Le père, Philippe, était hockeyeur (international et deux fois champion de France avec Grenoble). La maman était professeur de patinage artistique. « La patinoire était comme une deuxième maison », se souvient Yorick Treille. On est au début des années 80. L'actuel coach des Bleus vient de mettre les pieds dans le monde du hockey et n'en est plus sorti. Il jouera à Grenoble en jeunes. Mais, très vite, il a senti l'appel de l'Amérique. « Mon objectif était de partir là-bas et d'obtenir une bourse universitaire. » Il s'envole à 15 ans pour le Canada dans une famille d'accueil et réussit son pari, jouant quatre ans à l'université Mass-Lowell non loin de Boston.
Un joueur parti à la conquête de l'Amérique
Et le 26 juin 1999 lors de la draft NHL, les Chicago Blackhawks sélectionnent le jeune homme, 19 ans à l'époque. « J'ai été un peu surpris, raconte Yorick Treille. Ce n'était pas un objectif. Moi, je voulais finir mon cursus universitaire. Mais ç'a été une très grande fierté. » Treille plonge dans l'univers féroce des ligues mineures, où nombre de joueurs tentent de gagner une place en NHL. « J'y suis resté trois ans. J'aurai pu continuer, mais j'ai vu que j'avais peu de chance, et des jeunes arrivaient. »
Et Genève le voulait. Il a joué en Suisse, en Allemagne, en République tchèque. Et aussi vécu une riche carrière en équipe de France, pendant plus de quinze ans. « L'équipe la plus spéciale. Des gars comme des frères. » Yorick Treille se souvient quand les Bleus sont remontés dans l'élite en 2007 en Chine, « une épopée au bout du monde ». Il participera aux victoires historiques contre la Russie (en 2013) et le Canada (2014) lors de différents Mondiaux.

Une jeune carrière d'entraîneur mais diverses expériences
Treille joue à Mulhouse, quand il prend en main l'équipe en cours de saison. « Ce n'était pas un objectif d'être entraîneur, dit-il. Mais, vers 30 ans, j'ai eu des soucis de santé et je me suis dit que j'étais plus proche de la fin que du début. Le hockey sur glace représentait tellement dans ma vie. Donc si je pouvais transmettre, apporter une expertise... » Treille retrouve les Bleus, pour diriger les U20 puis être l'adjoint de Philippe Bozon, le sélectionneur de l'équipe de France.
Genève fait de nouveau appel à lui, pour un poste d'adjoint. Une offre qui ne se refuse pas. « Tous les meilleurs Européens qui n'étaient pas en NHL jouaient en KHL (en Russie), explique le technicien français. Quand la guerre a éclaté en Ukraine, ce n'était plus possible pour eux de rester là-bas. La Suisse est devenue le deuxième meilleur choix. Il y a les infrastructures, le niveau de jeu, la qualité de vie. »
Il sera champion de Suisse puis vainqueur de la Ligue des champions. En novembre dernier, Treille a eu droit à une jolie promotion, un peu empoisonnée, se voyant confier les rênes de l'équipe, qui avait brutalement chuté dans le bas du classement. Mais Genève s'est maintenu « et l'année prochaine l'objectif sera d'être dans le Top 6 pour accéder directement aux play-offs », confie son entraîneur.

Sélectionneur des Bleus depuis moins d'un an
En juin dernier, Philippe Bozon a été écarté, alors que le TQO pour les Jeux Olympiques 2026 approchait, et Treille nommé à sa place. « Cela n'a pas été facile à vivre, confesse ce dernier. Mais être à ce poste est un honneur. J'ai décidé d'accepter. Il fallait y aller, on ne sait pas ce qui peut arriver le lendemain. » Treille n'est pas parvenu à qualifier les Bleus, mais, en raison de la guerre en Ukraine, ces derniers peuvent récupérer la place de la Russie si cette dernière est suspendue. Pour l'heure, Treille et ses joueurs - dont son frère cadet Sacha (37 ans), international depuis 2007 et ancien capitaine des Bleus, sont focalisés sur le Mondial à Stockholm.
« J'aime ce qu'ils (les joueurs de l'équipe de France) donnent, l'implication physique, le dépassement de soi, la solidarité »
Yorick Treille, sélectionneur de l'équipe de France
En jouant bien mais en ne gagnant pas, contre la Lettonie (1-4), la Finlande (3-4 a.p.) et la Slovaquie (1-2) - le Canada était au-dessus (0-5). Rageant. De ses joueurs, Treille dit : « J'aime ce qu'ils donnent, l'implication physique, le dépassement de soi, la solidarité ». Le sélectionneur des Bleus a lancé dans le grand bain Antoine Keller, le jeune et prometteur gardien (20 ans) qui appartient aux Washington Capitals en NHL. Il a fait venir comme entraîneur-assistant le Canadien Norm Bazin, le coach d'UMass-Lowell « pour apporter un autre background ».
Les Bleus joueront deux matches capitaux pour leur maintien en élite, vendredi (16h20) contre l'Autriche et lundi face à la Slovénie. Treille est lié à la sélection jusqu'en 2028, année où la France organisera le Mondial. Il sera encore l'entraîneur de Genève la saison prochaine. « Ce n'est pas facile de cumuler, reconnaît-il. Mais les deux projets se nourrissent l'un de l'autre. »