La très pieuse Séville a toujours cru aux miracles. Et ces derniers temps, l'un des patrimoines de la ville, le Real Betis Balompié, est venu renforcer ses croyances. La résurrection d'Isco (33 ans) porte et transporte les « Beticos » depuis deux saisons. Consumé par l'exigence et la féroce concurrence au Real Madrid (2013-2022), le milieu de terrain ne quittait plus le banc de touche durant ses trois dernières saisons madrilènes.
Après une pige ratée au Séville FC, qu'il avait écourtée au bout de cinq mois (août à décembre 2022), Isco traînait un spleen irréfrénable. Préférant chercher des excuses et des coupables à sa progressive plongée dans l'anonymat, il avait perdu la foi, le plaisir, l'envie de s'entraîner et de faire les efforts élémentaires pour retrouver un niveau qui avait souvent fait frissonner de plaisir les gradins. Jusqu'à reconnaître sa dépression et avouer avoir pensé à raccrocher les crampons, au cours de sept mois sans jouer.
Des retrouvailles réussies avec Manuel Pellegrini
En bonne âme charitable sans le sou, le Betis, sous l'impulsion de Manuel Pellegrini - son ancien mentor et l'entraîneur qui avait fait décoller sa carrière à Malaga (2011-2013) - lui a alors tendu la main à l'été 2023, provoquant l'une des belles renaissances de ces dernières années. « Pellegrini a été fondamental dans sa rédemption, assure Manuel Fajardo, directeur sportif des Verdiblancos. Il lui a donné les clés du jeu et la confiance dont il manquait. Isco a retrouvé un cocon familial, le plaisir de jouer et est devenu l'extension du coach, qui a une confiance aveugle en lui. »
Positionné dans son rôle de prédilection de n°10 à l'ancienne, l'un des derniers émissaires d'un football romantique, où la vision et le toucher de balle comptent plus que les qualités athlétiques, a immédiatement fluidifié le jeu collectif du Betis. « Il est vital dans nos résultats et notre jeu qu'il éclaire et sublime, acquiesce son coéquipier, Marc Bartra. Son incroyable habileté technique nous permet de nous créer beaucoup plus d'occasions et d'être beaucoup plus efficaces à la finition qu'avant. Il est fondamental aussi par sa capacité à occuper et trouver les espaces libres, et à dicter le tempo. » « C'est le reflet de notre philosophie de jeu, souligne Farjado. Un exemple de professionnalisme et le joueur collectif par excellence qui a ce génie en lui. »
« Il a un impact énorme dans tous nos succès et est déjà certainement l'un des plus grands joueurs de notre histoire »
Manuel Fajardo, directeur sportif du Betis Séville
Un leader, une référence et une inspiration pour tous ses partenaires. « Que le joueur le plus talentueux de l'équipe presse et lutte pour gagner chaque ballon, c'est ce qui m'a le plus surpris, avoue Bartra. C'est contagieux et ça nous oblige à tous suivre sa voie. » Le phare et chef d'orchestre du Betis a pourtant cru replonger dans une spirale noire lorsqu'il s'est fracturé le péroné en mai 2024 et a été obligé de s'en faire réopérer quatre mois plus tard.
Le retour, après sept mois d'absence, d'Isco, fort d'un nouveau mental à toute épreuve, a coïncidé avec l'excellente deuxième partie de saison du Betis et sa qualification historique pour sa première finale européenne. « Il a un impact énorme dans tous nos succès et est déjà certainement l'un des plus grands joueurs de notre histoire », assure Farjado. Le Betis compte d'ailleurs sur l'expérience de son capitaine et ses quatre Ligue des champions glanées avec le Real pour conquérir la C4. Histoire qu'Isco boucle une semaine féerique, après avoir été rappelé, lundi, avec la sélection espagnole, après six ans de purgatoire. « Après tant d'années et les moments difficiles que j'ai traversés, ça se savoure encore plus », a reconnu l'intéressé, à nouveau rayonnant et épanoui.