« Quel est le joueur le plus fort que vous ayez affronté ?
(La réponse fuse dans un rire.) Rafa ! Et particulièrement sur le court Philippe-Chatrier. Dans la finale de 2019, je pense avoir joué un de mes meilleurs matches à Roland-Garros, mais il était quand même une classe au-dessus (6-3, 5-7, 6-1, 6-1).
Sur terre battue, Nadal était très fort, mais dès qu'on arrivait à Roland-Garros, il l'était encore plus. Sur le Chatrier, au bout d'un moment, vous ne saviez plus comment faire pour frapper un coup gagnant.
Quand vous êtes-vous senti le plus fort ?
Lors de l'Open d'Australie 2020, je me sentais très fort. J'étais plus offensif qu'en 2019. J'avais fait une bonne préparation
et j'étais dans la forme de ma vie. Je pouvais jouer quatre heures et remettre ça deux jours plus tard. Je jouais mon meilleur tennis et je suis allé jusqu'à la finale où je suis tombé sur un très bon Djokovic, c'est comme ça (défaite 6-4, 4-6, 2-6, 6-3, 6-4).

Y a-t-il un moment où vous vous êtes senti stupide sur un court ?
Dans la finale 2018 contre Rafa à Roland-Garros. À 4-4 dans le premier set, j'ai une volée vraiment facile à jouer. Je n'avais qu'à la remettre dans le court, mais je l'ai ratée. Je m'en voulais tellement... Et quand on entend la déception du public tomber
des tribunes, ce n'est pas trop agréable. Et derrière, Rafa accélère et en cinq minutes c'était 6-4, 3-0 en sa faveur (score final, 6-4, 6-3, 6-2).
Quel était votre endroit favori sur le circuit ?
J'adorais le court Suzanne-Lenglen. Je n'y ai joué que de bons matches. Ce court était parfait pour moi, il fallait s'accrocher pour m'y battre. Madrid, c'était sympa aussi. Il y avait un restaurant autrichien qui faisait que je me sentais comme à la maison.
Quel joueur détestiez-vous affronter ?
Ils sont quatre. Tomas Berdych, Juan Martin Del Potro, David Goffin et Kei Nishikori. Berdych et Del Potro me prenaient du temps (de préparation de coup) et je n'arrivais pas à développer mon jeu. Je n'ai jamais gagné contre eux (0-2 contre le Tchèque, 0-4 face à l'Argentin). Nishikori et Goffin, je pouvais les battre. Mais ils restaient collés à leur ligne et prenaient la balle très tôt, ils bougeaient bien.
« Le niveau que j'avais en Australie en 2020, c'était un tel sentiment de plénitude. Quand je me rêvais joueur de tennis, c'était le niveau que j'imaginais »
Quel est le moment qui vous revient souvent en mémoire ?
Plus que la victoire à l'US Open, c'est surtout le niveau que j'avais en Australie en 2020. C'était un tel sentiment de plénitude.
Quand je me rêvais joueur de tennis, c'était le niveau que j'imaginais. Jouer comme ça, c'est presque plus fort que la victoire
à l'US Open (2-6, 4-6, 6-4, 6-3, 7-6 [6] contre Alexander Zverev). Surtout que durant cette finale, le niveau de jeu n'était pas au niveau de l'Australie. Nous sortions de quatre mois sans compétition, pas de public. Et beaucoup de tension car, sans Federer, ni Nadal, et avec Djokovic disqualifié (pour avoir expédié une balle sur une juge de ligne lors de son huitième de finale contre Pablo Carreño Busta), tout le monde se disait que c'était le moment. Tout était réuni pour que le niveau de jeu ne soit pas terrible, mais c'était une expérience intéressante.
Quel a été votre plus grand fou rire sur un court ?
C'était durant la Laver Cup. Zverev jouait et Rafa était sur le banc. Il était vraiment nerveux car c'était un match à enjeu. Et,
dès qu'il y a de la compétition, il est toujours à 100 % (rires). "Sascha" avait une raquette avec une face bleue et une face rouge.
À un moment, il casse une corde et doit changer de raquette. Rafa regarde dans son sac et ne comprend pas pourquoi il y a des raquettes de couleurs différentes et commence à s'énerver. Le reste de l'équipe était mort de rire.
Que regrettez-vous le plus dans votre carrière ?
(Longue réflexion.) Quand j'ai eu ma première blessure au poignet (en 2021), je me suis dit que c'était juste pas de chance. Mais je n'ai pas suivi les conseils du docteur. Il m'avait dit de rester cinq semaines sans rien faire et j'ai repris trop tôt. Bien sûr, la blessure est revenue. Et cette fois, c'était très douloureux et je n'ai jamais vraiment retrouvé mon poignet. Si je n'avais pas fait cette erreur, j'aurais peut-être pu jouer un peu plus longtemps.
Dans quel joueur vous reconnaissez-vous ?
Je dirais Casper Ruud (finaliste à Roland-Garros en 2022 contre Rafael Nadal et en 2023 face à Novak Djokovic). Le lift qu'il met dans son coup droit me rappelle mes coups. Il est un des derniers à mettre autant d'effet dans ce coup. Aujourd'hui, la plupart des gars jouent comme s'ils étaient sur dur toute la saison. Ruud connaît le jeu sur terre battue.
« L'US Open, c'est au-dessus de tout. Remporter un Grand Chelem, c'est indescriptible »
Quelle est votre plus grande réussite ?
L'US Open, évidemment. C'est au-dessus de tout. Dès que j'ai commencé à jouer au tennis, remporter un Grand Chelem a été un rêve. L'accomplir, c'est indescriptible.

Quel était votre coup favori ?
Le revers long de ligne. C'est spectaculaire, mais c'était surtout important dans mon jeu. Surtout face à Novak ou Rafa. Pour battre Novak, il fallait pouvoir tenter quelque chose de spécial. Si vous jouez son jeu, vous ne pouvez pas le battre. Pas moi, en tout cas. Il fallait donc arriver à le surprendre.
Qu'est-ce que vous n'avez jamais dit que vous pouvez dire maintenant ?
Ce ne sera pas croustillant, mais le plus important est ce que je peux dire aujourd'hui à ma famille ou mes amis. Aujourd'hui, quand je n'ai pas envie de faire de sport, pas envie de bouger, j'arrive à le dire. Durant ma carrière, c'était impossible. Il fallait toujours respecter une routine, même lorsque vous n'en aviez pas envie. Aujourd'hui, si mon corps n'a pas envie, je l'écoute. »