Les Bleus ont pris la troisième place de la Ligue des nations et ils ne risquaient pas de faire un tour d'honneur pour si peu. Dans un couloir du stade de Stuttgart, ils ont reçu une médaille qui ne rejoindra pas le reste de l'argenterie du salon, après avoir battu l'Allemagne (2-0) chez elle, avec une satisfaction qui est allée grandissant au fil d'un match parfois tendu, traversé d'une esquisse de bagarre et de quelques noms d'oiseaux.
Avec seulement trois titulaires (Maignan, Rabiot et Mbappé) de la demi-finale contre l'Espagne (4-5, jeudi), l'équipe de France a terminé sa saison internationale sur une victoire qui lui permettra de passer de meilleures vacances, mais dont on atténuera la portée en raison de la valeur dissemblable de l'adversaire, et d'une première période globalement ratée.
Dans un match où le VAR a sauvé deux fois les Bleus, à juste titre, en annulant un penalty qu'Ivan Kruzliak avait accordé à Karim Adeyemi (31e) puis en revenant à une faute de Niclas Fullkrug sur Adrien Rabiot pour annuler le but de Deniz Undav (53e), il a quand même fallu que Mike Maignan fasse vraiment le boulot, derrière une défense souvent mal alignée, et trop facilement transpercée dans l'axe sur des situations simples. L'équipe de France, qui ne méritait pas forcément d'être menée 2-0 à la mi-temps face à l'Espagne, ne méritait pas non plus de mener 1-0 à Stuttgart, dimanche, sur le 50e but international de Kylian Mbappé.
Mbappé a retrouvé ses standards
Mais, ensuite, elle a su gérer cette avance en se montrant intéressante dans la transition, sous l'influence des projections de ses milieux et de la vitesse de ses attaquants. Mbappé aurait pu inscrire trois buts de plus et, tandis que Marcus Thuram a frôlé, en trouvant le poteau (59e), un troisième but en 30 sélections qui lui aurait fait un bien immense, le capitaine des Bleus est allé offrir le deuxième but à Michael Olise (84e) pour asseoir son statut de meilleur passeur de l'histoire de la sélection (32).
Deux buts et deux passes en deux matches, le Soulier d'or a retrouvé ses standards, ce qu'il appelle « ma norme » : c'était une attente majeure du rassemblement, après une première moitié de saison internationale très chaotique (voir page 13). Mais, plus largement, le chantier des connexions collectives reste ouvert. Sans surprise, c'est dans la transition que Mbappé a été le plus à l'aise, à Stuttgart, après que les permutations des quatre joueurs offensifs, surtout en première période, eurent donné des résultats incertains.
« J'aurais aimé qu'on puisse avoir toutes nos forces contre l'Espagne »
Didier Deschamps, sélectionneur des Bleus
La Ligue des nations a confirmé l'insistance de Didier Deschamps autour du 4-2-3-1 et il est tentant d'imaginer que ce système a de l'avenir. Défensivement, il faut convenir que cela a été une catastrophe, par moments, mais par manque de repères, avec deux défenses expérimentales, et par manque de personnel, aussi, en l'absence de trois titulaires (Koundé, Saliba et Upamecano). « J'aurais aimé qu'on puisse avoir toutes nos forces contre l'Espagne, avoue Deschamps. Je ne sais pas comment ça se serait passé, mais j'aurais aimé... Même si, quand on a le ballon, oui, il y a un travail défensif à faire pour être moins exposés. »
Des nouveaux gagnants mais une seule place à prendre
Si ce 4-2-3-1 a de l'avenir, aussi, c'est parce que le retour d'Aurélien Tchouaméni peut stabiliser le double pivot, parce que l'automne qualificatif ne proposera pas l'Espagne au programme, mais l'Ukraine, l'Islande et l'Azerbaïdjan, et parce que ce système se calque sur les grands talents offensifs de cette génération. Et sur l'influence axiale dont sont gourmands Olise et Rayan Cherki, qui se sont relayés dans cette position en Allemagne où, c'est de leur âge, ils ont été meilleurs en sortant du banc qu'en commençant le match.
« Les places seront chères », a lancé le sélectionneur, en évoquant la richesse offensive, et en se projetant sur septembre et le début des qualifications à la Coupe du monde. Si Malo Gusto est l'un des gagnants, comme Cherki dans un rôle de joker, il y a peu de places à prendre et d'incertitude autour de l'équipe de départ. La Ligue des nations n'a pas fait bouger les lignes : le retour des trois défenseurs titulaires est très attendu et c'est à gauche que le poste est le plus ouvert, parce que Lucas Digne n'a pas marqué son territoire, dimanche, et parce que Theo Hernandez ne traverse pas la meilleure période de sa carrière. Rien n'a changé au milieu, et à peine en attaque, sinon que Désiré Doué et Cherki sont entrés dans un paysage où Mbappé et Ousmane Dembélé laissent une place, et peut-être deux si le 4-2-3-1 continue.
Sinon ? Sinon, au bout d'une saison qui a commencé par le décrochage post-olympique de son audience et une esquisse de désamour et qui s'achève par un décalage avec le triomphe du PSG, l'équipe de France n'a probablement pas retrouvé toute sa place, encore, ni l'ancienne lumière qui l'accompagnait. Mais l'idée de la Coupe du monde, dès septembre, ramènera une lueur.