Parfois, rien ne vaut un classique. Après des mois de tous les possibles, des tournois plus ouverts que jamais et trois nouveaux vainqueurs de Masters 1000 (Jack Draper à Indian Wells, Jakub Mensik à Miami et Casper Ruud à Madrid), la finale à Rome, dimanche, remet au goût du jour une affiche d'habitués. Au Foro Italico, Jannik Sinner et Carlos Alcaraz ont remis de l'ordre après un joyeux festin qui a très bien servi certains outsiders du circuit. Les deux jeunes patrons (trois titres en Grand Chelem pour l'Italien, quatre pour l'Espagnol) ne pouvaient rêver d'un meilleur moment pour remettre leur duel sur le devant de la scène alors que Roland-Garros (25 mai-8 juin) puis Wimbledon (30 juin-13 juillet) se profilent.
C'est le genre de rendez-vous où ils ne veulent pas se manquer. Et cette finale en Italie est une affiche idéale pour les préparer. « Ça pourrait être grand, je ne vais pas mentir, s'enthousiasmait Alcaraz. Chaque fois que je joue contre lui, c'est toujours une bataille très, très difficile. J'aime bien ces moments-là aussi. » Sinner n'a que 23 ans, Alcaraz en a 22, mais cette rencontre sera déjà leur onzième affrontement sur le circuit (l'Espagnol mène 6-4) avec en point d'orgue leur quart de l'US Open 2022 (victoire de l'Espagnol). Pour la troisième fois, ils se retrouveront en finale : Sinner s'était imposé à Umag en 2022, Alcaraz avait maté son rival à Pékin l'an passé lors de leur dernière rencontre.
Une petite alerte pour Sinner
Cette année, ils s'étaient loupés. Alcaraz a laissé Sinner briller en Australie avant de connaître des semaines de grosses turbulences. L'Espagnol a commencé à reposer sa patte dès Monte-Carlo en remportant là-bas son plus gros titre depuis son sacre à Wimbledon l'an passé. Pour l'Italien, la situation était différente, forcément. Suspendu trois mois après avoir passé un accord avec l'AMA (Agence mondiale anti-dopage), le n°1 mondial a rongé son frein loin du circuit mais personne n'a réussi à être assez constant pour le déloger de son trône en son absence.
Et son retour à domicile s'apparente pour le moment à une marche triomphale. Elle peut laisser songeur, vu la nature de son absence, mais en Italie pas grand monde n'y trouve à redire. Et la pression que peut mettre le public local aux adversaires de ses protégés sera un des enjeux de cette finale.
La manière dont Sinner abordera ce match, tant sur le plan physique que sur le plan du jeu, sera aussi décisive. Face à Tommy Paul (1-6, 6-0, 6-3) en demi-finales, l'Italien s'est tenu plusieurs fois l'arrière de la cuisse droite. « Depuis le troisième tour, j'ai une ampoule sous le pied et c'est lié, minimisait-il après sa qualification. C'est juste un peu tendu, c'est normal et je ne suis pas inquiet. »
Le résumé de Sinner-Paul
Ce qui inquiète peut-être davantage l'Italien, ce sont les montagnes russes dans son jeu. Sublime pour laminer Casper Ruud (6-0, 6-1) en quarts (le Norvégien avait expliqué après le match n'avoir jamais rien vu de pareil), le protégé de Darren Cahill s'est sacrément fait peur face à l'Américain en livrant un premier set à côté de son sujet. Contre l'Espagnol, qui a affiché une belle détermination sur ses deux derniers matches et s'est rassuré après ses soucis physiques qui lui ont fait manquer Madrid, pareil trou d'air serait encore plus malvenu.
Un ascendant à prendre avant Roland-Garros
Surtout qu'au-delà du trophée de ce tournoi de Rome, le vainqueur marquera aussi son territoire sur le vaincu. À Roland-Garros, où ces deux-là sont assurés d'être têtes de série 1 et 2, ils arriveront en candidats principaux pour le titre et ne pourront s'y retrouver qu'en finale (où ils ne se sont jamais joués en Grand Chelem).
Alors s'imposer en Italie mettra forcément le gagnant dans une dynamique encore plus positive. Sinner ne s'y est pas trompé, voyant déjà plus loin que la finale du jour : « C'est un bon test pour moi, pour voir où j'en suis et ce que je dois améliorer. C'est bien de pouvoir jouer Carlos avant les deux Grands Chelems qui s'annoncent. » Avant la terre de Paris et l'herbe de Londres, le n°1 mondial n'a rien contre le fait de s'offrir un premier titre à domicile.