La forme du moment : « Sinner déroule »
« L'impression laissée depuis le début du tournoi n'est pas une indication. Sinner déroule et Alcaraz a des chutes de tension, oui. Mais Alcaraz fait du Alcaraz comme il le fait toute l'année avec quelques défaites et des victoires ébouriffantes. Là, il laisse des sets en route, tu ne sais pas trop pourquoi. C'est peut-être trop facile pour lui, je ne sais pas. Il y en a un qui est plus constant, Sinner, avec son niveau de jeu moyen super élevé à chaque seconde de chaque set. Il est pratiquement tout le temps à 90 % de ce qu'il peut faire. Alcaraz évolue peut-être parfois à un niveau en dessous, mais quand il parvient à son état de grâce, ça devient un poil au-dessus. »
Les confrontations directes : « La finale de Rome est anecdotique »
« Alcaraz reste sur quatre victoires de suite. Bien sûr que ça peut jouer. Sauf que si c'est à chaque fois des matches serrés, tu sais que tu vas souffrir quand même. Ce n'est pas Nadal qui joue Federer en finale de Roland-Garros en sachant qu'il a un petit matelas et que, dans le pire des cas, il pourra jouer quatre fois sur le revers... Si à l'inverse, comme Alcaraz face à Sinner, tu sais que pour gagner tu as dû faire des coups incroyables pour t'en sortir, tu n'arrives pas peinard. Et on ne peut pas prendre en considération la dernière finale de Rome (victoire d'Alcaraz 7-6 [5], 6-1). Sinner revenait de trois mois de suspension. Cette finale est anecdotique. »
La tactique : « Alcaraz te propose autre chose »
« On a vu Sinner se régaler contre Djokovic (6-4, 7-5, 7-6 [3]) car les deux jouaient en « tempo » ; il pouvait s'appuyer sur la balle de son adversaire. Alcaraz te propose autre chose avec sa variété et son jeu imprévisible. C'est dur de trouver son timing quand il n'y a pas de rythme. C'est plus simple quand il y a sans arrêt des rallyes à cinq échanges au minimum. Alcaraz, quand il est inspiré, c'est un tennis champagne, c'est pour ça qu'on adore tous regarder ses matches. Tu as une amortie, un coup droit qui part à 100 000 à l'heure, un service-volée, un retour-volée. Il n'y a jamais trois fois de suite le même point. Tout en étant capable, et il l'a fait dans le deuxième set face à Musetti (4-6, 7-6 [3], 6-0, 2-0, ab.), de lever la balle et de temporiser s'il en a besoin. Pour durcir le jeu comme tout bon Espagnol qui a grandi sur terre battue. »
Le physique : « Qui va réussir à faire reculer l'autre ? »
« Les deux aiment jouer très proche de leur ligne et imposer leur jeu. La question, c'est de savoir qui va réussir à faire reculer l'autre le premier. Si Sinner est contraint à l'essuie-glace, ça va être dur. Alcaraz est meilleur dans ce secteur du jeu, en termes de défense loin du corps. Mais Sinner reste tellement collé à sa ligne que ce n'est pas simple de l'en faire décrocher. L'Italien est un métronome capable de jouer à une vitesse phénoménale. Alcaraz a plus de puissance que Sinner, sa frappe est plus lourde et il est capable de jouer aussi vite, voire plus vite que l'Italien. Il va falloir voir aussi comment Sinner va être physiquement pour tenir cinq sets contre Alcaraz. Certes il a pu s'entraîner pendant ses trois mois privé de compétition. Mais il n'y a rien de tel que les matches. Quelques fois, contre Djokovic, vendredi soir, je l'ai vu rechercher son souffle, ce qui est rare. »