Jusqu'au bout, Unai Emery aura caressé l'espoir d'un cinquième titre de champion d'affilée pour Paris, qui aurait été le premier, pour lui. Mais ses déclarations d'optimisme ont fini par se heurter à une réalité implacable, inévitable, guettée par la France du foot. Le PSG qui a chuté face à Monaco est le PSG d'Emery, forcément, et ses plus farouches avocats auront beau arguer, peut-être à juste titre, que son effectif était moins fort que celui de Laurent Blanc, son prédécesseur, depuis les départs non compensés de Zlatan Ibrahimovic et de David Luiz, le technicien espagnol tient une part de responsabilité non négligeable dans l'échec du club de la capitale.
Il n'a pas imposé son style
Lorsque Nasser al-Khelaïfi a définitivement porté son choix sur le technicien du Séville FC pour remplacer Blanc, en juin dernier, le président parisien entendait que son nouvel entraîneur débarque avec sa philosophie de jeu, basée sur un pressing haut, une transition rapide vers l'avant et l'importance des latéraux dans l'animation offensive. Ce que le nouveau Paris a donné à voir pendant sa préparation estivale jusqu'au Trophée des champions (4-1 contre Lyon le 6 août) aiguisait l'appétit des supporters et observateurs. En fait, jusqu'à la défaite à Monaco (1-3, le 28 août), en Championnat, ce Paris-là portait de véritables promesses. Puis, les contre-performances ont commencé et la défaite à Toulouse (0-2, le 23 septembre) a amorcé un premier virage.

Deux jours plus tard, une réunion est provoquée dans le vestiaire par Emery sans qu'il en imagine les conséquences. Les cadres du groupe annoncent la couleur : ils veulent revenir à un jeu basé sur la possession. Ceux qui assènent que le technicien ne renie jamais ses principes en prennent pour leur grade. Le PSG va revenir à un schéma et au style qui ont fondé ses succès passés, plus sur la maîtrise du ballon, moins sur le contre.
Il a fait des choix contestables
Face à cette révolte des cadres, le Basque réplique par un management qui se veut égalitaire. Il assure que tous ses joueurs «sont des X» mais ne semble pas avoir la même gestion pour les recrues que pour les anciens. Jesé, Ben Arfa et Krychowiak n'auront jamais sa confiance, comme si Emery voulait montrer qu'il avait compris son nouveau vestiaire et qu'il faudrait rentrer dans le moule pour y avoir son rond de serviette. Dans le même temps, Di Maria multiplie les piètres prestations. Mais il demeure titulaire sur toute la première partie de saison, celle où Paris perd le titre. De la même manière, certaines décisions en cours de match n'ont pas toujours renforcé son crédit. C'est le cas notamment contre Monaco (1-1, le 29 janvier) avec l'étonnante entrée de Guedes, au Parc des Princes, ou encore à Nice (1-3, le 30 avril), lorsqu'il fait glisser Matuidi au poste de latéral gauche.
Il a insinué le doute contre Barcelone
Mais c'est surtout le coaching effectué à Barcelone (1-6, le 8 mars), et la décision de laisser Javier Pastore sur le banc, qui interpellent encore. Le deuxième virage décisif de la saison parisienne se situe justement au moment de l'humiliation en Ligue des champions. Avant, pourtant, le PSG avait sans doute sorti le meilleur match de l'histoire du club dans sa version qatarienne. En huitièmes de finale aller, les Parisiens avaient puni le Barça (4-0, le 14 février) dans des proportions inattendues et c'était avant tout la victoire de leur entraîneur.
Quelques minutes après sa conférence de presse, Emery retrouve son vestiaire tout à son bonheur et casse l'ambiance : «Je connais Barcelone. On peut en prendre quatre là-bas.» Cette remarque lui vaut les huées ironiques de ses joueurs mais il insiste : «Non, non, arrêtez ! On peut en prendre quatre là-bas !» D'une certaine manière, l'entraîneur parisien instille le doute dans l'esprit de son équipe. Seulement, pour le club de la capitale, il sera plus facile de désigner les médias comme responsables.
Lors de la séance d'avant veille du match retour, Emery organise une opposition au cours de laquelle son équipe doit imaginer qu'en face, il y a Messi à droite et Neymar à gauche. Les joueurs doivent se positionner en conséquence. Soudain, l'entraîneur parisien s'énerve : «Oh ! Draxler ! Le foot, pour toi, c'est juste attaquer ?» Il intime alors l'ordre à l'attaquant gauche allemand de se placer plus bas. De l'autre côté, Lucas observe la scène et, discrètement, vient se replacer encore plus bas que l'Allemand. Deux jours plus tard, même si Emery a demandé à son bloc de ne pas trop reculer, il constate que ses joueurs sont conditionnés par l'idée de ne pas lâcher... Messi et Neymar.

Il a fragilisé ses gardiens
L'un des derniers points sur lequel Emery ne s'est pas forcément distingué porte sur la gestion de ses gardiens. Comme le soulignait Fabien Barthez dans ces colonnes (le 9 février), l'absence de hiérarchie claire à ce poste a fragilisé les deux candidats. En privé, l'entraîneur parisien s'est plaint du niveau d'Alphonse Areola – qu'il a voulu conserver l'été dernier – et de Kevin Trapp. Peut-être que ces deux-là n'ont pas encore répondu aux exigences d'un grand club européen, mais Emery aurait dû en choisir un et le rassurer. On peut comprendre, alors, que chaque match devient un examen avec sanction pour des joueurs qui évoluent à un poste spécifique. Toutes les autres grandes écuries européennes ont, elles, nommé un numéro 1 et un numéro 2.
S'il a brillé pendant trois saisons au Séville FC, le Basque n'avait encore jamais eu à gérer de fortes personnalités comme celles du PSG. Il aura sans doute appris énormément de cette première année parisienne et sait, désormais, une partie des écueils à éviter quand on est à la tête d'un grand club. Dans un entretien au quotidien El Pais, le 29 novembre, Emery assurait qu'Al-Khelaïfi l'avait recruté parce qu'il «a le gène d'un gagnant». Il serait préférable pour lui de l'exprimer lors de la finale de la Coupe de France, le 27 mai.